LA BARBE

On se souvient d’un homme à la barbe étrange, d’une jeune femme curieuse, d’une clé tachée de sang et de cadavres retrouvés derrière la porte d’une chambre interdite… Barbe Bleue est une sordide histoire de féminicides, sans cesse actualisée au fil des époques, se mêlant à l’Histoire, s’emparant du fait divers. Dans La Barbe, deux sœurs nous parlent de leur rencontre avec Barbe Bleue. Usant du conte, elles mettent en scène des moments de cette histoire pour en comprendre les ressorts, traquer le prédateur et répondre à une question : A quel moment devient-on une proie pour l’autre ? Elles mettent en parallèle le conte et leur histoire personnelle en interprétant différents rôles, des personnages de la fiction à leur entourage, créant ainsi un trouble entre fiction et réalité, et jouant des frontières entre la dimension fantastique du conte et l’aspect documentaire de témoignages.

« Ouvrez tout, allez partout, mais pour ce petit cabinet, je vous défends d’y entrer, et je vous le défends de telle sorte, que s’il vous arrive de l’ouvrir, il n’y a rien que vous ne deviez attendre de ma colère. »

Citation de Barbe Bleue de Charles Perrault

→ La représentation du mardi 6 février sera suivie d’un temps d’échange et de discussion avec l’équipe artistique et l’association VIFFIL SOS-Femmes autour des violences dans le couple. Pour plus d’informations, n’hésitez pas à visiter leur site internet : https://www.viffil.com/

Parler des violences conjugales à travers le conte.

C’est par le prisme du célèbre conte de Barbe bleue que ce spectacle traitera des violences conjugales. La France a enregistré une hausse de 40% des signalements de violence conjugales lors du premier confinement en 2020, et près de 60% lors du deuxième. En France une femme meurt tous les 3 jours, tuée par son conjoint ou son ex-conjoint.* Ces chiffres rappellent que les violences conjugales sont un fléau sociétal qui traversent nos vies. Le silence de la société les favorise. Ce sujet sera le cœur de notre spectacle.

Faire le choix du conte, c’est permettre d’aborder le sujet en gardant une forme de distance face à une réalité dure. L’univers du conte de barbe bleue est riche et il est inscrit dans l’inconscient collectif : On se souvient du mari barbare, de la femme curieuse, d’une chambre interdite, d’une clé tachée de sang et de cadavres dans le placard. Une histoire cruelle de féminicides. La figure de barbe bleue est devenue un réel mythe. Elle a été sans cesse actualisée se mêlant à l’Histoire, s’emparant du fait divers. La dimension fantastique du conte est un axe qui sera développé en parallèle d’une forme plus documentaire. La clé qui saigne, l’étrangeté du personnage de Barbe Bleue, l’univers du château… sont des éléments oniriques qui offrent de la liberté de traitement au plateau.

Souvent critiquée, la curiosité sera récompensée dans cette version de Barbe bleue. Poussée par la clef qui saigne – « la fée » du conte – l’héroïne est poussée à découvrir les crimes de son mari. « Une leçon pour devenir moins naïf.ves et plus autonome où les lecteur·trices peuvent apprendre comment échapper à un rôle sacrificiel et destructeur » explique Ute Heidmann.

Car le féminicide est au cœur de nos faits divers. **
L’histoire de Barbe bleue est un moyen efficace pour démasquer et combattre l’autorité conjugale abusive. User de la violence (physique ou psychologique) est un acte de pouvoir et domination, elle gangrène le couple. La remise en question du « bonheur pour toujours » de ce conte interroge le schéma de nos relations sentimentales. Si le spectacle s’engage aux côtés des femmes pour leur droit à la liberté et à l’intégrité, c’est aussi pour faire reconnaître que les violences faites aux femmes, sont des manifestations des inégalités persistantes entre les femmes et les hommes.

Multiple, le conte de Barbe bleue est à la fois : Un conte merveilleux, un thriller psychologique avec ses crimes répétés, un récit initiatique adressé aux jeunes femmes, une histoire à suspens, un sordide fait divers. Ce spectacle naviguera d’un genre à l’autre grâce à ce conte qui sera notre toile de fond.

*Chiffres provenant du ministère de l‘Intérieur 2021
**« Le 5 mai 2021, journal Le Monde : « Mérignac : une femme meurt, brûlée vive en pleine rue par son mari récidiviste» / La depeche.fr le 01 juin 2022 : « Féminicide à Nice : un homme tue sa compagne, leur enfant de 9 ans assiste à la scène » / La nouvelle république Publié le 14 juin 2022 : « Féminicide à Blois : une mère de famille poignardée à mort, son conjoint incarcéré » …