CINQ MAINS COUPÉES – Étape de travail
Sophie Divry / Collectif X & La Quincaillerie moderne
TEXTE Sophie Divry
MISE EN SCÈNE Benjamin Villemagne & le collectif X
JEU Katell Daunis, Kathleen Dol, François Gorissen, Lucile Paysant, Ryan Larras + Un choeur de participant·es
SCÉNOGRAPHIE, LUMIÈRE & VIDÉO Charles Boinot
SON Poaskay
Sophie Divry sera présente jeudi 9 pour un mot pré-spectacle ainsi que vendredi 10 pour un bord plateau avec la mère de Gabriel, l'un des mutilés de la main pendant le mouvement des Gilets Jaunes.
Vous trouverez également une table de livres proposée par la Librairie Rive Gauche sur les 3 jours.
Plaidoyer choral contre la violence de l’État.
Dans ce texte, pas une phrase n’est de Sophie Divry. Toutes sont issues d’entretiens réalisés entre septembre 2019 et février 2020 avec les cinq manifestants mutilés de la main lors du mouvement des Gilets jaunes. Ils étaient tous droitiers, ils ont tous perdu la main droite. Il travaillait à l’usine, il amarrait des bateaux, ils étaient plombier, étudiant ou apprenti chaudronnier. Un samedi de manifestation, leur main a été arrachée par une grenade bourrée de TNT, et leur vie n’a plus jamais été la même. Chacun a raconté son histoire à l’autrice, qui en a fait un choeur. Parce que c’est une seule et même histoire, celle de manifestants démembrés alors qu’ils formaient un même corps.
Avertissement : le texte décrit précisément, des actes chirurgicaux, des mutilations et des scènes de violences policières.
PLUS DE PRÉCISIONS
Par hasard, les deux compagnies stéphanoises que nous sommes, la Quincaillerie Moderne et le Collectif X, avons eu l’envie de porter un même texte à la scène, au même moment, et sans nous concerter ! Il s’agit de Cinq mains coupées, de Sophie Divry. Nous avons donc décidé de nous associer pour porter cet ambitieux projet à deux équipes qui n’en formeront plus qu’une.
Dans le texte de Sophie Divry, on retrouve fidèlement retranscrits mais entrelacés, les cinq témoignages de manifestants mutilés lors des manifestations des Gilets Jaunes entre septembre 2019 et février 2020. L’autrice n’a pas choisi la forme fictionnelle, poussée par une absolue nécessité de rendre compte de la réalité de ces vies-là. Elle fait quelque chose de net, de fort : elle disparaît. Il n’y a aucun mot d’elle, pas trace de narratrice. Par ce geste, Sophie Divry transcende la mission journalistique et fait œuvre des paroles et des corps invisibilisés. C’est politique, et c’est très concret. Car cela nous parle vraiment.
C’est dans ce geste-là que nous voulons nous inscrire également pour continuer l’honorable travail de l’autrice. Tout au moins, y ajouter notre modeste savoir-faire. Admiratifs de ce fin travail littéraire, humble et politique, nous avons eu envie de faire entendre ces voix, fabriquer des sons et des images, inviter du monde, créer des chœurs… Bref, en proposer une adaptation théâtrale !
Cinq mains coupées est une archive militante qui nous a réveillé.e.s et nous a rassemblé.e.s dans notre révolte et notre envie d’agir. En vérité, aucun.e d’entre nous ne faisait partie du mouvement des Gilets Jaunes, on se sentait peut-être au-dessus, ou pas concerné.es. Alors que pourtant on était pas les dernier.ère.s à s’indigner de la violence d’État, du classisme, de la non redistribution, du saccage du service public, des violences policières, de la fraude fiscale généralisée et de l’augmentation des inégalités dans notre pays. On aurait pu a minima s’intéresser à ce mouvement, essayer de le comprendre, de le soutenir, mais on a préféré le mépriser ou au moins l’ignorer. En fait la réalité c’est qu’on était pas assez dans la merde pour sortir dans la rue et qu’on est pas vraiment solidaire des gens qui eux sont dans la merde. Et puis il y a eu la réponse de notre gouvernement. Les images. Les sons. La violence, la vraie, bien sourde, bien lourde implacable. C’était insoutenable de voir comment le gouvernement traitait son peuple.
Pour nous aujourd’hui, monter Cinq mains coupées au théâtre, c’est raconter le courage, la force mais aussi le désespoir d’une population qui ne peut plus vivre décemment, qui se sent rabaissée, humiliée quotidiennement et qu’on n’a pas su entendre et soutenir quand il était temps.
Ces cinq personnes sont le peuple, les citoyens, elles sont nous tous, nous toutes.
Créer un chœur sur scène sera le centre du travail. C’est une évidence et un appel provenant du texte de Sophie Divry. L’entrelacs des cinq témoignages crée une réelle partition chorale, qu’il convient vraiment de considérer comme telle. Un groupe d’une vingtaine de personnes, si la production le permet : des acteurices professionnel.le.s mais aussi des amateurices. Tou.te.s seront différent.e.s en âges, en origines, en couleurs de peau, en genres. Le chœur c’est le peuple, ce sont nos voix.
Constituer une équipe associant professionnel.le.s et amateurices pour concevoir une forme de spectacle mixte. Il y aura des interprètes fixes qui seront rejoint.e.s par de nouveaux participant.e.s au choeur en fonction du lieu accueillant le spectacle. Chaque nouvelle date sera ainsi précédée de quelques jours de résidence avec les amateurices in situ avant le spectacle. Une formule que l’on souhaite très accueillante et participative.
Durée : 1h30