
KOMOREBI
Clémentine Allain / Arthur Vandepoel / Cie Haydalur

TEXTE Clémentine Allain
MISE EN SCÈNE Clémentine Allain et Arthur Vandepoel
JEU Clémentine Allain, Arthur Fourcade et Arthur Vandepoel
SCÉNOGRAPHIE Raphaëlle Detheve (avec un premier regard d'Émily Cauwet-Lafont)
LUMIÈRE & SON Maxime Rousseau
COSTUMES Émily Cauwet-Lafont
« Prolonger une existence et la prolonger autrement - n’est ce pas cela, hériter ? » Au bonheur des morts, Vinciane Despret.
Komorebi (木漏れ日) : Terme japonais désignant les rayons du soleil
qui filtrent à travers les feuillages et leurs jeux d’ombres au sol.
Une artiste peintre vient de mourir.
Une femme et un homme, l’ayant connue de son vivant, se rencontrent chez elle après sa mort.
Elle, l’amie d’enfance, la connaissait bien, mais les deux femmes s’étaient perdues de vue depuis longtemps.
Lui, un auteur, amateur d’art, avait commencé à réaliser une série d’entretiens avec la peintre juste avant son décès.
Les saisons défilent, et la femme et l’homme se retrouvent dans cette maison. Iels parlent d’art, regardent par la fenêtre, s’accompagnent dans le deuil, et nous invitent à passer ces moments avec elleux.
SOUTIENS Labo 71 de l’ENSATT, Théâtre des Clochards Célestes, La Fédération, Théâtre Nouvelle Génération, Théâtre National Populaire, Théâtre de l’Élysée PARTENAIRES Bourse Première Fois de l’ADAMI
Pour aller un peu plus loin…
Une actrice et un acteur viennent nous raconter comment deux personnes – une femme et un homme – se rencontrent après la mort d’une artiste peintre qu’iels avaient connue avant sa mort. Elle connaissait intimement la peintre, Lui connaissait son œuvre (non moins intimement puisqu’il fréquente ses tableaux comme on rendrait visite à des amis).
Elle et Lui se retrouvent dans la maison où la peintre a habité et à côté de laquelle se trouve l’atelier où elle a peint toutes ses œuvres. Ces œuvres resteront invisibles – « hors de notre regard » – durant la pièce. Mais ces œuvres existent : Émily Cauwet-Lafont les a peintes. C’est un fil rouge dans son travail. Dans ses costumes, elle glisse souvent ce qu’elle nomme des « secrets » : tissus précieux dissimulés dans les revers de nos vestes et pantalons.
Nous assistons – acteur·ices et spectateur·ices – à leurs rencontres égrainées le long d’une année, avec la trame du deuil en arrière-plan et ce que ces deux-là vont plus ou moins consciemment se proposer d’en faire ensemble. Tout dans cet endroit comme retiré du monde et hors du temps, est imprégné de la présence de cette autre, la peintre. La femme et l’homme l’évoquent, vont même aller jusqu’à la convoquer. Tout va se dérouler comme une forme de cérémonie. Leurs échanges évoluent au fil des saisons. Au début, iels s’efforcent de rentrer en contact et d’entretenir le dialogue. Mais ensuite, quand ils se retrouvent une dernière fois, ces « banalités » apparentes sont peut-être la seule façon de se dire, sans l’écraser, la profondeur du lien qui à présent les unit ; car, pour citer Roland Barthes, « il y a des cas où seule l’insignifiance est délicate ».
Juste avant de me plonger dans l’écriture de la pièce, pendant plusieurs mois, j’ai écouté les cours de Roland Barthes au Collège de France, particulièrement son cours sur le Neutre. Je les ai écoutés avec une attention parfois un peu flottante, mais ne revenais jamais en arrière me disant que – peut-être – quelque chose « était passé » ailleurs. Cela m’a marqué. Roland Barthes y parle de la délicatesse comme d’une transgression, de la douceur comme d’un acte de résistance, de la minutie – de l’attention prêtée aux détails, aux nuances, à « l’infiniment futile » – comme d’une sensualité. Se rapprocher et prendre soin de ce qui est petit, c’est se sentir intensément vivant. Prêter attention à ces infimes variations de l’air, de la lumière, aux infinies nuances de l’aube, en un mot, de ce qui nous entoure, de celles et ceux qui nous entourent, raconte une certaine façon d’être au monde.
Durée : 1h15